Banni des régimes, tueur d’animaux, une réputation légèrement sulfureuse… voilà qu’il n’en fallait pas davantage pour diligenter une enquête sur le suspect avocat. Alors, fréquentable notre oléagineux- vinaigrette ?
Cet article est écrit dans le cadre du carnaval d’articles « Des blogs et des Plantes » dont l’édition de ce mois-ci est portée par Elise du blog Actubio et a pour thème l’avocat (Persea americana). Vous avez jusqu’à fin janvier pour participer vous aussi!
Un oléagineux, ça fait grossir
Forcément, dans les régimes amincissants, on considère que les olives, les cacahuètes et les avocats n’ont pas leur place. Tous ces fruits et graines dont on tire de l’huile sont évidemment bien trop gras. Jusqu’à 32% dans la chair de l’avocat quand même ! Pour vous donner une idée, une moitié d’un bel avocat, c’est plus d’une cuillerée à soupe d’huile végétale !
Mais quelle erreur ! Car à ce qu’il paraît, sa richesse en oméga 9 en fait un excellent coupe-faim, l’ennemi des fringales. Donc un allié des régimes.
Et le gras c’est aussi bon pour la santé. Bon évidemment, pas le gras cuit et recuit dans lequel baignent les frites de Macdo, on est d’accord. Mais on a besoin de ces acides gras mono-insaturés bénéfiques contre les maladies cardio-vasculaires ! Et des autres aussi d’ailleurs, j’en parlais déjà quand j’évoquais l’huile de palme l’autre jour dans cet article.
Et les gaines de nos neurones, composés de myéline ont besoin des lipides pour se régénérer, surtout en cas de stress. Bon, c’est vrai le cerveau préfère les omégas 3 et 6. Mais l’insaponifiable contenu dans l’huile a tout de même été proposé pour le traitement de la sclérose en plaque….
Et un tas de fonctions dans le corps ont besoin de gras, de pleins de gras différents ! Tenez la peau, elle aussi elle a besoin de gras pour se protéger, surtout en hiver quand sa production de sebum ne suffit plus ! C’est d’ailleurs dans un usage cosmétique que l’huile d’avocat tirée de sa chair vert tendre fait le plus de merveilles. Un anti-âge parait-il !
La persine toxique
Oui, Persea americana de son doux nom latin contient de la persine. Oui, notre accusé plaide coupable : il a déjà empoisonné à l’aide de ce poison des animaux de compagnie. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à consulter la page du centre antipoison de Nantes.
Mais est-ce de sa faute si il est si appétant et si toxique à la fois pour nos chers compagnons ? Si on vient l’attaquer et le grignoter ? Non, lui n’a rien demandé à personne. Et pourtant, il se fait dépouiller. Pas uniquement de ses fruits. Ses feuilles aussi sont utilisées en médecine traditionnelle !
Car la persine voyez-vous n’est pas si perfide que ça pour nous être humain. Et en médecine traditionnelle on prête à l’avocatier d’innombrables vertus dont bien peu ont avoir avec les fruits souvent bien plus connus que leur généreux pourvoyeur.
Ainsi, les feuilles sont utilisées dans la Caraïbe traditionnellement contre l’hypertension (cet usage est validé par Longuefosse), la blesse, la diarrhée (cet usage est également validé), la grippe, les parasites type ascaris, les rhumatismes, les troubles hépatiques…
Longuefosse relève également un usage utile contre les règles insuffisantes.
Il a été démontré que l’extrait aqueux des feuilles a des propriétés analgésiques et anti-inflammatoires.
Et dites, vous saviez que ses feuilles contiennent une huile essentielle? Elle est riche en estragol.
Une féroce envie d’avocat
Mais dites donc, aux Antilles, ce plat qui s’appelle féroce d’avocat ne serait-il pas révélateur de son caractère ? Mais là encore, notre accusé est victime d’un malheureux malentendu. Dans ce plat, ce n’est pas l’avocat le coupable… mais ses complices ! Oui, figurez-vous que ce mélange d’avocat, de morue et de farine de manioc assaisonné avec du citron et des aromates (oignon pays, piments végétariens) compte aussi…. Du piment ! C’est donc bien les épices les coupables, pas notre avocat qui n’est en réalité qu’amour et tendresse.
Car… (petite mélodie romantique en arrière-plan)
Le mot avocat nous vient du mot aztèque ahuacatl qui signifie … testicule. Tout un programme n’est-ce pas ? L’hypothèse la plus communément admise considère que c’est en référence à la forme de l’avocat. Je suis sûre que vous allez le regarder différemment la prochaine fois que vous ferez vos courses. Au fait, pour choisir un avocat mûr (non, mais c’est important aussi), exercez une légère pression au niveau du pédoncule ; le noyau doit être libre à l’intérieur.
Mais il existe une autre interprétation, peut-être pas si éloignée de la première finalement si on considère la théorie des signatures développée dans l’Antiquité. Car les Aztèques lui prêtaient des qualités aphrodisiaques. Les extrémités des branches de l’arbre étaient des amulettes pour la fécondité, que l’on a retrouvé dans les vestiges de civilisation précolombienne (7 800 ans av JC).
Et aux Antilles ? Le père Labat qui se baladait ici (et là-bas !!) pour évangéliser et boire du rhum (ou l’inverse ?). Non, je ne suis pas mauvaise langue, à Marie-Galante, il y a quand même un rhum qui porte son nom, si ça c’est pas suspect ! Bref, ce père Labat qui a laissé derrière lui un immense témoignage sur les us et coutumes de l’époque raconte et je cite : qu’ « il provoque les appétits vénériens », rien que ça !
Mais qu’est-ce qui pourrait bien lui valoir ces propriétés ? Aujourd’hui, on sait que l’avocat est riche en folates (ou vitamine B9 ou encore acide folique) et en potassium, éléments susceptibles d’augmenter les pulsions sexuelles des femmes et des hommes ! D’ailleurs pour une femme qui souhaite tomber enceinte, la consommation d’acide folique, qui intervient dans le développement du fœtus et de son système nerveux est tout à fait recommandée. Contrairement aux feuilles qui sont elles à proscrire chez la femme enceinte en raison de leur activité sur la stimulation utérine.
Alors, une envie de fraises ou d’avocat ?
8 replies to "Feroce, l’avocat (Persea americana)?"
Bonjour, je consomme le noyau d avocat sous forme d infusion depuis 6mois car c est le seul remède que j ai trouvé pour ma colite lymphocitaire. Je suis enceinte d un mois et je le demande s il y a des contre indications pendant la grossesse pour le foetus…etc… Quelqu’un saurait il me répondre car même le centre anti poison n en a aucune idée. Merci d avance.
Bonjour bedel, je suis bien incapable de répondre à une telle question. Et j’ignorais cette vertu. Il faut savoir que la prise d’une tisane devient un véritable remède lorsqu’elle est prise régulièrement et sur la durée, il y a donc matière à se poser des questions. Surtout que pour tout remède, on conseille de laisser ce qu’on appelle une « fenêtre thérapeutique », c’est à dire un moment de repos au corps, par exemple, 3 semaines de traitement, une semaine d’arrêt, et on reprend. En avez-vous parlé avec votre médecin? C’est la première chose à faire, au moins pour qu’il évalue le risque.
Bonjour, tu ne parles pas du noyau, j’ai rencontré des articles qui le louaient pour toutes ses qualités et j’en ai donc fait et écrit des recettes.
Râpé, c’est très esthétique et cela donne une jolie finition à un plat.
Aujourd’hui je lis qu’il pourrait être nocif pour la santé, sais tu où je pourrais trouver une information sûre?
Bonjour Bénédicte, pas de panique, il est nocif pour les animaux, pas pour les êtres humains! Je n’ai effectivement pas parlé du noyau, mais c’est vrai qu’il est excellent pour la santé lui aussi. Il mériterait un article entier à lui tout seul 🙂
Magnifique article, merci Cécile !( et Vincent pour la recette!).
Plein d’humour et d’infos passionnantes .
Du coup je me pose ( et te pose donc ) une question:
J’ai pour habitude de donner les peaux d’avocat à ma petite chèvre ou de les mettre dans mon compost.
Bon la chèvre est toujours debout ( et pourtant nous sommes gros consommateurs d’avocat à la maison!), mais peut-être devrais-je éviter?
Merci!
J’en profite pour découvrir « ActuBio ».
Je mangeais très peu d’avocats jusqu’à un voyage au Chili, où tous mes contacts locaux (et moi par la même) mangeaient des avocats comme nous on mange des pommes 😉 Il s’en vend partout dans les rues, à des prix localement très bas, rien à voir avec ceux entre 1 et 2 euros l’unité ici !
Je crois que c’est un des rares goût dont j’ai l’impression que je pourrai ne jamais me lasser.
Dans les milieux végétariens/crudivores/paleo, il me semble que l’avocat est très reconnu pour ces bonnes graisses, je ne savais pas qu’il avait mauvaise presse ailleurs. Ton article devrait contribuer à redorer son blason !
Onctueux, fondant et exquis, il n’y a rien à redire ce fruit, comme cet article est excellent, très belles recherches ! Je ne pensais pas que ses feuilles avaient de telles propriétés ni même que ce fruit pouvait agir sur la libido…
Pour moi l’avocat est un produit qui se prépare plus qu’il se cuisine, il est simplement bon, un zeste de citron et une pincée de sel peuvent suffire à sublimer son goût. Arrêtons de faire du guacamole avec ces sachets d’épices tout prêt alors qu’un oignon, un peu de tomate, de la coriandre fraiche et du citron suffisent. (faites juste mariner tous ces ingrédients 1h avant d’ajouter l’avocat 😉
Merci Vincent pour cette recette de guacamole « maison ». Effectivement, souvent, en cherchant à faire compliqué ou parfait, on met la barre trop haute et on finit par acheter tout fait. Rien ne vaut la simplicité!