Quand j’ai vu l’image sur le moteur de recherche aujourd’hui, j’ai eu un petit sursaut dans le coeur, comme si je connaissais la femme qui se tenait là, telle une exploratrice, le regard au loin sur son voilier…

Jeanne Barret! J’avais découvert son extraordinaire histoire au jardin botanique de Roscoff l’année dernière, qui outre sa magnifique collection de végétaux, le lieu est magnifique te vaut le détour à lui seul, présente sur le parcours les portraits de célèbres explorateurs. Dont UNE femme! Ou plutôt, devrais-je dire, de Jean Baré….

Car à l’époque, les femmes étaient interdites sur les bateaux. A fortiori pour une expédition scientifique sur La Boudeuse ou L’Etoile. En 1767, ces bateaux partent pour le premier tour du monde sous le commandement de Louis-Antoine de Bougainville, chargés de botanistes, d’astronomes et autres savants.

Alors, comment cette femme s’est retrouvée là, à explorer de nouvelles contrées, à herboriser et à classer des végétaux dont le fameux Bougainvilliers aux fleurs roses, nommé ainsi en l’honneur du commandant de l’expédition?

Pour suivre son compagnon, Commerson, dans cette folle épopée, elle s’est travestie tout simplement, se faisant passer pour son « assistant ». Cheveux courts, habits d’homme et poitrine bandée, la voilà embarquée pour cete folle avanture. Les rumeurs courent néanmoins et la supercherie est découverte lorsqu’à Tahiti, les autochtones reconnaissent en elle une femme! Mais au vu de son labeur exceptionnel (5000 espèces ramenées en France, dont 3000 nouvellement identifiées!), il n’y a pas de sanction de la part du commandant qui l’autorise à rester, mais pas dans la même cabine que son amant. Plus tard, elle aura la reconnaissance du roi Louis XVI. 

Une plante aux caractères sexuels mal identifiés (une boutade sans doute) portera même son nom, un hommage que lui rend Commerson avec la Baretia bonnafidia.

Il écrit ceci dans ses notes : « Cette plante aux atours ou au feuillage ainsi trompeurs est dédiée à la vaillante jeune femme qui prenant l’habit et le tempérament d’un homme eut la curiosité et l’audace de parcourir le monde entier, par terre et par mer, nous accompagnant sans que nous-mêmes ne sachions rien. Tant de fois, elle suivit les pas de l’illustre Prince de Nassau, et les nôtres, traversant avec agilité les plus hautes montagnes du détroit de Magellan et les plus profondes forêts des îles australes […]. Elle sera la première femme à avoir fait le tour complet du globe terrestre, en ayant parcouru plus de quinze mille lieues. Nous sommes redevables à son héroïsme de tant de plantes jamais récoltées jusqu’alors, de tant de collections d’insectes et de coquillages, que ce serait préjudiciable de ma part, comme de celle de tout naturaliste, de ne pas lui rendre le plus profond hommage en lui dédiant cette fleur. »

Malheureusement, la plante a été renommée depuis, effaçant le nom de Jeanne Barret des livres de botanique. Une injustice réparée depuis par un américain qui a baptisé une solanacée en son honneur. Ouf…

Voici une petite vue du magnifique jardin exotique de Roscoff (France, Bretagne Nord), tournée en 2019:

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