Le vent dans les voiles et les oreilles qui sifflent… j’ai découvert le bonheur de la navigation. Un rêve repoussé depuis de nombreuses années. Toujours une bonne raison de ne pas embarquer. Pas le temps, un trek à faire sur la terre ferme, des congés à se reposer, et puis où aller ? Ah pis c’est hors de portée, les autres commencent à la maternelle sur des lasers, moi c’est fichu, j’ai jamais mis un pied sur une planche à voile.
Et puis, je me suis lancée. J’avais aussi un peu besoin d’un défi après ces derniers mois houleux à osciller entre déprime et envie de guerroyer. Et vous savez quoi ? C’était génial. Par contre, j’aurais pu faire constater mes bleus comme femme battue, car la vie à bord comme à terre n’est pas de tout repos. Entre les bêtes écorchures, les bleus, les bosses, l’hygiène pas toujours au top, mes huiles préférées ont eu du pain sur la planche. Vous vous en doutiez, non ?
Levons le (grand) voile sur ces 4 situations à risques sauvées par mes fidèles compagnes- HE :
1- Quand on m’a traitée de poule mouillée
Bon, c’est certain qu’en Bretagne il pleut. Ca arrive, statistiquement. Pas de chance c’était aujourd’hui. Sûrement qu’en mer c’est mouillé. Mais de là à pratiquer la brasse coulée dès le premier jour dans la prame* qui fait la navette depuis St Nicolas, j’étais pas prête avec mon pantalon en coton et mon vieux coupe-vent qui a sûrement été étanche dans une autre vie. On peut louer des cirés qui disaient… j’aurais aimé en voir la couleur avant d’être trempée jusqu’aux os. Mais où sont ces fameux vêtements ? C’est maintenant qu’il faut les proposer, je suis prête à y mettre une fortune à l’instant même. Mon royaume pour un ciré aurait dit Richard. Sûrement. J’imagine. Avant de voir jeté mon sac au fond du bateau dans 10 cm d’eau. Personne n’écope ? Ah bon, c’est normal… je découvrirais bientôt que la normalité sur l’île de Drennec est toute relative. C’est un état indépendant ici, avec ses propres règles, son vocabulaire et son fonctionnement. Ses hauts gradés et tout et tout. Enfin surtout les troufions comme moi en nombre certain.
Je ne rêve que de me changer et de sortir mon duvet du sac mouillé. Mais on m’explique que le corps s’adapte au froid, que ce n’est pas la peine/ pas le moment/ ca passera… blabla…discours confus sur une demande à faire à l’univers… je n’écoute plus la leçon de morale, je suis concentrée sur mes orteils qui ont perdu en mobilité. Zen ou pas zen, je suis frigorifiée. En Martinique il fait globalement meilleur quand même. Savez-vous qu’il a grêlé au mois de juin en Bretagne ? Y a plus de saison ma pauvre dame. Ah ! c’est fini la longue présentation du stage et des stagiaires, je vais pouvoir remédier à cette catastrophe. Ah ben non pas tout de suite, faut trouver une place dans une des tentes. Pis aller à la pêche au ciré. Pis pas louper le dîner. Pis…
euh.. je vais sortir mon huile essentielle de Saro du sac. On sait jamais si après la fatigue du voyage et 3h mouillée par 8°C…mon immunité était un peu faiblarde, hein. Je fais confiance à l’univers, évidemment, mais un petit coup de pouce ne sera pas mal interprété ? Olfaction, massage au poignet en prévention.
Je rigolerai (sous cape) 2 jours plus tard quand le moniteur sentencieux n’arrivera pas à se lever à l’heure pour notre cours à 9h pour cause de… grosse crève ! On a attendu trois quart d’heure sous la pluie. Mais c’est pas grave on avait nos cirés cette fois. On apprend de ses erreurs dans la vie.
Moralité : aide toi et l’univers t’aidera. Les belles paroles suffisent rarement et l’appui d’une huile essentielle ne peut pas faire de mal. Les HE à oxydes terpéniques seront de bonnes alliées dans ce cas là pour booster l’immunité et avoir une action anti-infectieuse ciblée sur les voies respiratoires. Pas un éternuement n’a osé se faire entendre. Si c’est trop tard, l’action seule d’une de ces HE est rarement efficace, il faudra lui adjoindre une HE riche en monoterpénols pour de meilleurs résultats : on pense par exemple au célèbre Tea tree, mais ce n’est pas la seule option.
2- Quand on m’a pas dit que j’aurais vue sur cunégondes (les toilettes high-tech de l’île)
Les cunégondes, ces ancêtres des toilettes sèches, cette cabane au fond du jardin fermée par un léger filin (une intimité toute relative) avec la voisine à 5 mètres sont emblématiques du problème sanitaire sur l’archipel des Glénan, dixit le Télégramme
Problème pour l’hygiène des stagiaires peut-être, mais ça, c’est négligeable quand on considère qu’on dort au-dessus des crottes de mulot. C’est aussi et surtout pour l’environnement puisque la pollution organique générée par ces installations on été soulignées dans le rapport Natura 2000 depuis 2006. Comprenez : des centaines de personnes déféquant et urinant toutes les semaines sur une île de même pas 0,2km2 ou 20ha (à titre de comparaison une exploitation agricole moyenne en métropole c’est 55ha). A la fin de la semaine, on creuse un trou à côté et on rebouche. On est assis sur un sacré paquet de …hum…
Mais ce problème environnemental ne nous concerne pas ici. On s’attardera surtout sur les conséquences de la séparation toilette/lavage des mains, à moins que ce ne soit le paramètre absence d’hygiène dans la cuisine commune (on est des amateurs, hein pas des élèves de l’école hôtelière même si la confection de 200 cookies en un temps record tend à prouver le contraire pour la bordée qui me concerne, petite fierté que je me devais d’exposer)… toujours est-il que des diarrhées impromptues et des maux d’estomac se sont répandus dans la nuit de jeudi à vendredi (rien à voir avec les cookies, je suis formelle, c’est moi qui ai fait les pépites de chocolat, je jure qu’il n’y avait aucun mulot dans les parages). Ouch, l’odeur dans ces toilettes où il n’est pas question de rajouter de la sciure ou autre…. c’était phénoménal.
Une prévention à l’aide de ma musclée cannelle feuille m’évitera de faire partie du lot des malchanceux. Je préfère ignorer d’où ça vient. Et me boucher le nez. Allez je partage, je sais, mes astuces peuvent sauver des vies : un trait d’un roll on de Menthe poivrée à 5% en-dessous des narines les jours de grande puanteur. Un peu comme la technique des médecins légistes finalement, qui exploitent des molécules comme le menthol, l’eucalyptol, le camphre. Aux grands maux, les grands remèdes. Enfin, sans mauvais jeu de mot pour les autopsiés qui eux ne s’en remettront pas, mais ce n’est pas le sujet.
3- Quand la baume de GV m’en veut personnellement (ou le mono, le doute est permis)
Je suis assise bien en retrait. Je lance un regard noir à gauche sur le winch qui a laissé filé le bout entre mes doigts il y a à peine une heure me brûlant la pulpe du majeur et de l’index malgré une technique consciencieusement appliquée dite de la pince. Je jette un œil furtivement à l’écoute de foc qui tel un serpent envoûté des souks orientaux se jettent sur mon mollet à chaque virement de bord. Tout semble en ordre quand le mono m’interpelle : je dois aller choquer du hale-bas. Ca ne me réjouis pas toute cette affaire pour une fois que je m’étais mise suffisamment loin de toutes ces ficelles diaboliques… mais voilà, j’y vais, me disant qu’on a de la marge avant l’empannage. J’ai à peine le temps de lever le loquet, que sans crier gare, la baume de grand-voile me fauche sur son passage. Le choc dans l’épaule droite me projette à l’opposé du bateau, tandis que je croise le barreur qui se précipite dans l’autre sens. Je suis un peu sonnée. Beaucoup même. Trop pour m’intéresser aux plaintes du mono qui s’est emmêlé les pinceaux. Encore. Décidément, il veut ma mort !
La sécurité, c’est le matin quand on met notre bouée. Après dans la journée, c’est chacun pour soi et Dieu pour tous comme on dit. Dans ces conditions l’aide de mes divines HE est bienvenue.
Le soir, la douleur est vive. Je ne me suis pas rendue compte de l’ampleur des dégâts. Je répare ce manque d’attention en vitesse avec un peu de mon mélange anti-choc. L’hélichryse italienne en est la principale composante et la plus utile. Je ne promène pas le flacon entier quand je suis en ballade car c’est une HE coûteuse et vu mes mésaventures précédentes avec des flacons évaporés… enfin bref, c’est une autre histoire.
4- Quand j’ai réalisé qu’il faisait plus frais à l’extérieur du frigo
Habituellement avec les grosses chaleurs et la canicule qu’il y a eu en juin, ouvrir le frigo constitue un pur moment de bonheur pas plus de 35°C à l’extérieur : une bouffée de frais qui éclate au visage et réjouit les sens. Une sensation délicieusement fraîche qui vient hérisser les poils et faire frémir la transpiration… comme dans les pubs Hollywood chewing-gum vous voyez ? Mais ça, c’était avant. Quand le frigo tournait. Car pour économiser l’essence et les batteries, et le sommeil léger du mono, le frigo a fini par ne plus être allumé qu’une ou deux heures par jour, en fait pour le départ du port et l’arrivée au mouillage. C’est très peu quand on voit les aliments frais dégouliner. Sans parler de l’odeur de ce qui commence à fermenter là-dedans depuis une semaine.
Je ne suis pas du genre à gaspiller. Mes camarades non plus. Hauts les cœurs, on fera bien cuire tout ça. Longtemps. Ah, non ça c’est pas possible, le gaz aussi est limité. Bon ben…
Petit add-on au menu pour moi : une cuillerée d’huile d’olive avec 1 goutte d’huile essentielle de basilic GV et une goutte de cannelle feuille. Allez hop, si y a des trucs pas nets, ils ne devraient pas survivre à pareil traitement. De quoi manger de bon appétit, sans trop se soucier des conséquences de la prolifération bactérienne.
Récap pharmacie de bord voilier: le top 5 des huiles essentielles du plaisancier amateur:
(j’imagine que le pro a apprivoisé les cordages malicieux, expérience oblige)
Du Saro : pour booster l’immunité et anticiper les coups de froids
Du Basilic grand vert : pour aider la digestion (le tropical fait aussi bien)
De la Cannelle feuille : pour passer au travers des gastros
De l’Hélichryse italienne : pour les coups et les bleus
Du Ciste ladanifère : je n’en ai pas parlé, mais les palans sont au moins aussi agressifs que les cordages et un brin plus sanguinaires. Une HE hémostatique s’avère sympa pour ne pas rebarbouiller le pont avec votre sang dans un style Picasso (plutôt période Guernica).
Bonus : on m’avait pas dit que le mono avait le mal de mer (huile essentielle utile)
De Menthe poivrée : pour les odeurs, mais aussi, si vous y êtes sujet, le mal de mer. Eventuellement, le mal de mer peut constituer, de ce que j’ai pu voir, une excellente excuse pour se soustraire à la corvée de cuisine par mer à peine houleuse ou bateau légèrement gîté au profit de l’observation des dauphins : prévoyez une bonne dose de Menthe poivrée à administrer de force s’il le faut à ceux qui auraient une tendance excessive à l’oisiveté camouflée sous un mal de tête fulgurant ou toute autre maladie imaginaire survenant systématiquement à point nommé face aux corvées. Conseil d’ami. C’est pas moi qui vous l’ai dit.
Je termine par un grand merci à l’école de voile sans qui cette expérience n’aurait pas été possible. C’est ce qui me permet de partager avec vous aujourd’hui ces grands moments que je n’aurais jamais pu vivre ailleurs. Et surtout, de prouver encore une fois l’énorme pouvoir des huiles essentielles quand elles sont bien utilisées, dosées et surtout…. sélectionnées avant le départ.
Bonnes vacances, anticipez le pire, avant de partir, et … ne gardez au final que les meilleurs souvenirs !
* il y a un tas de mots savants spécifiques au domaine de la voile dans cet article. Il fallait bien que je montre que j’avais, malgré tout, été une bonne élève, car je partais de zéro et l’apprentissage a été concluant malgré ces péripéties et le trait à peine grossi pour les besoins de l’article. Ne vous inquiétez pas, c’est une langue bizarre que celle de la voile, mais on s’y fait. Je vous laisse, je me replonge dans le kindle de Moitessier, La longue route.
15 replies to "Pharmacie de bord voilier: des huiles essentielles spéciales navigation"
Re-bonjour !
Pour les bleus (effectivement en mer pour peu que ça bouge un peu plus les bleus sont incontournables…) que penses-tu Cécile de ce que j’ai préparé pour la nav : 60ml à 3% (trop peu ?) :
8gtt géranium bourbon
10gtt gaultherie couchée
5gtt menthe poivrée
5gtt immortelle
Qsp macérat huile millepertuis (qu’une amie m’a donné et de sa fabrication)
Bon, comme je n’ai pas eu de bleus cette année (pourtant c’est une année à vent) je n’ai pas pu constater de l’efficacité… elle m’aurait été utile l’année dernière…
Je crois que j’ai mis le géranium bourbon pour l’aspect calmant lors des longues traversées (longtemps sans terre j’avoue que ça me stresse un peu, je suis d’abord terrienne !)
Merci Cécile
Bonjour Cécile, bonjour Caroline et à tous, j’ai bien rigolé à la lecture de cet article, merci !Je navigue 2 à 3 mois par an et j’ai carrément emporté toutes mes huiles dans leur boîte à casier d’aromazone ! Que conseillerais-tu pour les piqûres de méduses ? Cette année il y en a énormément en Méditerranée et j’ai des boutons et démangeaisons qui reviennent. L’hydrolat de menthe poivrée est bien utile pour apaiser (aussi pour se rafraîchir des grosses chaleur) mais je crois qu’il me faut autre chose… Je rajouterai aussi une HE contre le stress, en cas de conditions météos non conformes aux prévisions et qui surviennent très soudainement en Méditerranée ou pour ceux qui craignent les quarts lors de longues traversées…
Bonjour Cécile, un truc génial.. Je prends la mer pour les Scilly fin août (novice). Vite fait entre deux tournées avant hier (je suis infirmière libérale et j’utilise pas mal les HE pour mes patients, en faisant très attention. C’est une autre histoire!) je cherche sur mon téléphone les HE que l’on doit emporter sur un bateau, en pensant: Demain je vais regarder si Cécile dit quelque chose à ce sujet et…j’ouvre ma boite mail et je lis: « La folle aventure en mer »! Mince j’y crois pas!
J’ai trouvé cette coïncidence très chouette! Et merci pour l’article!!!
Bel été
Pascale
d’aventure en aventure ,c’est une chouette expérience pour qui aime la mer
Pour moi ce fut sur un bateau de pêche (le travail professionnel) c’est une autre histoire,
et a cette époque je n’avais pas connaissance des H E pour les bobos aux quotidiens mais cela reste de bons moments
Bon retour parmi nous
Super sympa ton article sur la navigation, c’est un très bon sport et une technique passionnant.
Moi même je suis passionné de voile et avec mon cousin sur un 43 pieds on navigue souvent en méditerranée…
Maintenant je prendrai toujours ma trousse cocotte création remplie de nos merveilleuses huiles pour les petits bobos du bord.
Bon vent, Cécile et à très bientôt.
Aromatiquement.
Patrick
Super article plein d’humour. Une chance que vous aviez bien choisie vos HE. vous seriez encore mal en point.
Bravo !
j’ai bcp ri (désolée) à la lecture de ton article. Je ne suis pas voileuse (au grand dam du paternel, breton 😉 ), et tu renforces ma position.
Je n’ai même pas envie de tester la menthe poivrée pour mon mal de mer, sauf si tu m’affirmes qu’elle est anti tétanie et encore… (oui, je suis propre moi en mer, je me contente de faire une crise de tétanie dans un coin lol)
Une lecture captivante de tes aventures !!! Pour moi à partir du 15 juillet c’est la Bretagne ,le Finistère sud mais j’espère sans la grêle ,les parkas et tous les désagréments que tu as répertoriés. Mais avec une trousse aroma de secours dans les bagages !!!
Ahah, le mois de juin a été un brin original, mais ça s’est bien amélioré 😉
Bonjour Cecile.
Quel plaisir de te retrouver dans un nouvel article plein d’humour.
J’ai vécu toute ma jeunesse prêt de l’océan; son odeur, qui m’a longtemps manqué, me procure un immense bien être intérieur. J’espère que tu as pu en profiter toi aussi.
Amicalement.
Bonjour Philippe, je suis comme toi, besoin d’eau dans mon environnement… et là, c’était le rêve. Jamais d’ennui à rien faire, juste contempler 🙂
Merci pour tes précieux conseils et bon vent pour de nouvelles aventures !!!
Bel été à toi et tous tes fidèles lecteurs / lectrices va sans dire 🙂
Merci Christel
Pour la partie voilier, le chapitre se ferme… pour le moment!
Au top Cécile…..il te reste à tester la yole quand tu reviendras sous le soleil des tropiques……
Ahaha! C’est vrai, tu sais que je n’ai jamais testé?! Ca me semble autrement plus sportif avec un risque de déssaler très largement supérieur… ceci dit l’eau est plus douce par chez nous